Les professionnels libéraux exerçant une activité réglementée sont actuellement plus de 700 000 en France. Pour rappel, les professions libérales réglementées sont celles nécessitant un diplôme ou une qualification spécifique pour pouvoir être exercées. Elles sont en outre régies par un Ordre et imposent le respect d’un code de déontologie et/ou d’un code de conduite.
Le problème, c’est qu’au gré des réformes successives, les règles applicables à ces professions ont peu à peu perdu en clarté. Afin d’y remédier, le gouvernement a donc publié au journal officiel le 9 février 2023 une ordonnance (n°2023-77) visant à améliorer la lisibilité et la cohérence des dispositions applicables aux professions libérales. En attendant son entrée en vigueur le 1er septembre 2024, on vous détaille les principaux changements qu’elle va apporter.
La création de trois familles de professions libérales réglementées
L'une des principales nouveautés de l'ordonnance n 2023-77 est la création de 3 familles de professions libérales réglementées :
- La famille des professions de santé (médecin, infirmier libéral, dentiste…) ;
- La famille des professions juridiques ou judiciaires (avocat, mandataire judiciaire…) ;
- La famille des professions techniques et du cadre de vie réunissant les autres professions libérales.
Un décret à venir permettra de connaître avec certitude à quelle famille appartiennent certains professionnels libéraux, comme les conseils en propriété intellectuelle par exemple.
Une définition précise de la notion de « professionnel exerçant »
Le terme de « professionnel exerçant » est utilisé à plusieurs reprises dans l’ordonnance. Pour clarifier les choses, ses rédacteurs le définissent comme « une personne physique ayant qualité pour exercer sa profession, enregistrée en France conformément aux textes en vigueur et réalisant de façon indépendante des actes relevant de sa profession. » Ils précisent par ailleurs que la seule réalisation d'actes de gestion ne confère pas la qualité de professionnel exerçant.
Dans la même veine, une définition de la « personne européenne » – un terme une fois encore très souvent utilisé dans l’ordonnance – est également donnée. Il s’agit d’une « personne physique ou morale établie dans un État membre de l'Union européenne autre que la France, dans un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou dans la Confédération suisse et qui exerce, dans l'un de ces États, une activité présentant les caractéristiques d'une profession libérale réglementée ».
Interdiction de créer des sociétés de droit commun
Actuellement, les professions judiciaires et juridiques (avocats, notaires, commissaires de justice, administrateurs ou mandataires judiciaires, etc.) peuvent exercer dans des sociétés de droit commun (SARL ou encore SAS). À partir du 1er septembre 2024, il ne sera plus possible de créer de telles structures. Les professionnels devront obligatoirement passer par des sociétés d'exercice libéral (SEL), mais pourront choisir la forme de leur société (SELAFA, SELARL, SELAS…).
Ceux qui sont déjà en activité ont jusqu’au 31 août 2025 pour se mettre en conformité avec cette nouvelle règle.
SEL : de nouvelles formalités à accomplir
Chaque année, la SEL est tenue d'adresser à l’Ordre dont elle relève la composition de son capital social.
L'ordonnance renforce cette obligation d'information : à partir du 1er septembre 2024, la SEL devra également fournir :
- La répartition de ses droits de vote ;
- Une version à jour de ses statuts ;
- Les conventions contenant des clauses sur l'organisation et les pouvoirs des organes de direction ayant fait l'objet d'une modification au cours de l'exercice écoulé.
Les modalités de cette nouvelle procédure devraient être précisées par un décret propre à chaque profession.
Assouplissement des règles relatives au droit de vote double
Autre nouveauté apportée par l’ordonnance, l’allègement des restrictions concernant les droits de vote double.
Aujourd’hui, les SEL peuvent attribuer des droits de vote double à leurs associés ou actionnaires. Une faculté encadrée par trois règles :
- Seuls les associés ou actionnaires en exercice au sein de la SEL peuvent détenir des droits de vote double ;
- Les droits de vote double sont conférés à l'ensemble des associés ou actionnaires en exercice au sein de la SEL. Toutefois, les statuts peuvent prévoir une condition d'ancienneté d'au maximum 2 ans ;
- Les actions à droit de vote double ne peuvent être transférées qu'à des professionnels en exercice au sein de la SEL.
À partir du 1er septembre 2024, seules les SEL exerçant une profession de santé seront concernées par ces restrictions. Autrement dit, les SEL des autres professions pourront accorder ou céder des droits de vote double :
- Aux associés ou actionnaires exerçant en dehors de la SEL sans qu'ils soient majoritaires ;
- À une partie seulement des associés ou actionnaires en exercice au sein de la SEL, même si ces derniers détiennent la majorité du capital de la société.
Les modalités de retrait des associés de SEL assouplies
À compter du 1er septembre 2024, les statuts de SEL pourront définir les modalités de retrait des associés sous réserve qu'aucun texte propre à chaque profession ne prévoie de dispositions particulières à ce sujet.
Les SPFPL pluriprofessionnelles désormais ouvertes aux géomètres-experts
Pour rappel, les sociétés pluriprofessionnelles d’exercice (SPE) ont été instituées en 2015 pour faciliter la création de sociétés multi professionnelles. Elles permettent aujourd’hui l’exercice en commun de huit professions :
- Avocat, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation ;
- Commissaire de justice ;
- Notaire ;
- Administrateur judiciaire ;
- Mandataire judiciaire ;
- Conseil en propriété industrielle ;
- Commissaire aux comptes ;
- Expert-comptable.
La nouvelle ordonnance ajoute à cette liste les géomètres-experts qui pourront donc intégrer une SPE à compter du 1er septembre 2024.