L’article 244 bis A du Code Général des Impôts (CGI) prévoit que, sous réserve de l’application des conventions internationales, la plus-value réalisée par un contribuable non-résident fiscal français(1) lors de la cession d’un bien immobilier en France est soumise à un prélèvement.
Mais il est également prévu dans ce même article(2) un cas d’exonération pour la cession d’un bien immobilier en France, avec ses dépendances immédiates et nécessaires, sous réserve que ce bien constitue la résidence principale du cédant à la date du transfert de son domicile fiscal hors de France :
- dans un Etat membre de l’Union européenne (UE)
- ou dans un Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle, et qui ne soit pas un Etat Non Coopératif.
Cette exonération s’applique aux cessions de biens immobiliers cédés depuis le 1er janvier 2019(3), sous réserve de respecter deux conditions cumulatives :
- la cession du bien immobilier doit être réalisée au plus tard le 31 décembre de l’année suivant celle du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France
- l’immeuble ne doit pas avoir été mis à disposition de tiers, à titre gratuit ou onéreux entre ce transfert et ladite cession
Dans le cas d’espèce de cette affaire, un contribuable devenu non-résident fiscal français a cédé son ancienne résidence principale en France après le 31 décembre suivant l’année de son installation à l’étranger. L’exonération de la plus-value immobilière lui a été refusée aux motifs que la cession n’avait pas été réalisée dans les délais prévus par la loi.
Le contribuable concerné a donc soulevé auprès du tribunal administratif de Nice, que la condition relative au délai de cession, sans qu’il ne soit tenu compte des caractéristiques du bien cédé ou du marché immobilier, était contraire au principe d’égalité devant la loi et devant les charges publiques, puisque cela instaurait une différence de traitement entre contribuables résidents et non-résidents, mais également « entre contribuables non-résidents selon le moment de l’année auquel est intervenu le transfert de leur domicile fiscal hors de France, la cession de l’immeuble devant dans tous les cas intervenir avant le 31 décembre de l’année suivant ce transfert ».
Le Tribunal a alors transmis cette Question Prioritaire de Constitutionnalité(4) (QPC) au Conseil d’Etat afin de savoir si cette demande était recevable et pouvait être présentée au Conseil Constitutionnel(5).
Le Conseil d’Etat, par un arrêt du 11 décembre 2021(6), a refusé de renvoyer devant le Conseil Constitutionnel cette QPC aux motifs que cette dernière n’était pas nouvelle et ne présentait pas de caractère sérieux. Pour lui, « si, en règle générale, le principe d’égalité devant la loi impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n’en reste pas pour autant qu’il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes (…) le législateur, qui a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels, et a accordé aux contribuables revendiquant le bénéfice de l’exonération un délai suffisant pour céder leur bien, indépendamment de la date du transfert de leur domicile fiscal, n’a pas méconnu le principe d’égalité devant la loi et devant les charges publiques ».
Pour rappel : il est important de préciser qu’un non-résident fiscal réalisant une vente immobilière d’un bien dont il est propriétaire depuis moins de 30 ans est sujet aux obligations fiscales suivantes :
- Déposer (via son notaire) une déclaration de plus-value et payer l’impôt y afférent s’il en résulte une plus-value taxable (l’absence de plus-value taxable n’exonère pas de cette déclaration).
- Désigner un représentant fiscal(7) si la part du prix de cession lui revenant est supérieure à 150.000 €.
Le représentant fiscal a pour rôle de signer la déclaration de plus-value, garantir l’exactitude des éléments donnés pour son calcul, et s’engage à payer l’impôt et les pénalités en cas de redressement fiscal.
Achevé de rédiger le 14 février 2022 par Amandine Horn-Valleau, juriste fiscaliste patrimonial LCL Banque Privée.
(1) Au sens de l’article 4 B du CGI
(2) Article 244 bis A-I-1 du CGI
(3) BOI-RFPI-PVINR-10-20-19/04/2019 §440 et suivants
(4) L’article 61-1 de la Constitution prévoit en effet que « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». Cette procédure est également connue sous le nom de Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC).
(5) L’éligibilité du renvoi d’une QPC est soumise à trois conditions cumulatives :
- Les dispositions contestées doivent être applicables au litige ou à la procédure en cours, ou constituent le fondement des poursuites,
- Les dispositions contestées n’ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel
- La question doit être nouvelle ou présenter un caractère sérieux
(6) CE 9-10 chambre, 10 décembre 2021, n°456728
(7) Article 244 bis A-IV-2 du CGI